Les commerçants demandent parfois à leur bailleur une baisse de loyer qui devient trop lourd. En période de crise économique, ces demandes explosent. Quelles sont les règles ? Quelle stratégie devez-vous adopter, en tant que bailleur ?
Certains loyers deviennent trop lourds à supporter
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Dans le cadre d’un bail commercial, le loyer constitue souvent le poste de charges le plus important. Si, en temps normal, une baisse ponctuelle du chiffre d’affaires peut être absorbée par la trésorerie existante, une baisse continue du CA pendant de longs mois est problématique et le poids de ce loyer peut devenir insupportable. Les commerçants se retrouvant dans cette situation réclament souvent à leur bailleur une baisse de loyer, en dehors du cadre des renégociations parfois organisées au terme des périodes triennales.
Pas d’obligation du bailleur de baisser le loyer
Soyons clair : rien de « légal » dans cette demande. Les baux commerciaux faisant état d’un loyer indexé sur le chiffre d’affaires restent exceptionnels. La grande majorité des loyers sont fixes pendant toute la durée du bail (9 ans au moins), indexés chaque année en fonction de critères et de règles précises.
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Dans ces conditions, c’est à vous, bailleur, de décider des suites à donner à une telle demande.
Deux situations peuvent se présenter :
La demande est faite dans un contexte de loyers impayés
C’est votre droit ; Vous pouvez souhaiter ne pas répondre favorablement à la demande et même déclencher la procédure de résiliation du bail. Vous reprochez, par exemple, au locataire de ne pas avoir provisionné assez de trésorerie (qui aurait due être suffisante pour honorer ses engagements s’il bénéficie d’aides de l’Etat) et/ou de ne pas vous avoir contacté avant de stopper le paiement du loyer pour trouver une solution…
Tout congé donné à un locataire devant être motivé, sous peine de nullité, vous devez invoquer comme raison du congé « un motif grave et légitime », comme l’est, entre autres, le non-respect par votre locataire de ses obligations contractuelles (non-paiement du loyer). Reportez-vous à notre fiche pratique Résiliation du bail commercial par le bailleur, qui détaille le process et les règles à respecter. A noter que le versement d’une indemnité d’éviction n’est pas obligatoire en cas de résiliation du bail pour non-paiement du loyer.
La résiliation du bail peut être rapide si une clause résolutoire a été inscrite dans celui-ci. Attention toutefois ! Votre locataire peut demander au juge de suspendre la mise en œuvre de cette clause et de lui accorder des délais de paiement. Cette demande est souvent accordée aux locataires de bonne foi, subissant une baisse de leur chiffre d’affaires, par exemple.
Le juge propose alors un échéancier de paiement pouvant être étalé sur 2 ans mais ne dépassant pas 1 an dans la majorité des cas. Si le locataire ne respecte pas cet échéancier, il se met alors hors-la-loi, devenant « occupant sans droit ni titre ». Vous pouvez alors saisir le tribunal de grande instance en référé afin de faire constater la résiliation du bail.
Votre locataire peut une nouvelle fois demander un échelonnement des loyers. Le juge peut accepter, à la condition que l’arriéré locatif soit réglé en 2 ans maximum. Les effets de la clause résolutoire sont alors à nouveau suspendus.
Le juge peut aussi refuser la 2ème demande d’échelonnement, et ordonner l’expulsion. En parallèle, le locataire pourra être condamné à payer la dette locative, une indemnité d’occupation et les frais d’huissier et d’avocats.
A noter ! L’absence d’une clause résolutoire est exceptionnelle dans le cadre d’un bail commercial, mais elle existe. Dans ce cas, demandez au TGI l’autorisation de résilier le bail pour non-paiement des loyers. Le juge peut vous suivre, mais l’opération sera plus longue et le juge bénéficiera de plus de marges de manœuvres qu’en présence d’une clause résolutoire.
La demande est faite dans un contexte de loyers payés
Malgré un contexte difficile, votre locataire a fait l’effort de payer son loyer, mais sa trésorerie fond, et il ne pourra bientôt plus faire face. Ce problème survient en raison d’éléments extérieurs forts… comme la crise sanitaire et économique du Covid 19, par exemple. Malgré toute sa bonne volonté et ses efforts pour s’adapter à une situation exceptionnelle, votre locataire vous indique que sans baisse du loyer, il ne pourra plus honorer ses obligations.
Bien sûr, rien ne vous oblige à accéder à sa demande. Mais si vous ne le faites pas, les loyers impayés seront la prochaine étape. Libre à vous de laisser la situation en arriver là pour, ensuite, résilier le bail commercial, comme décrit plus haut.
Mais il peut aussi être judicieux de trouver un arrangement avec votre locataire, surtout s’il est en place depuis des années et que vos rapports ont toujours été bons.
-1er des arguments en faveur de cette baisse du loyer : la crise économique que subit votre locataire en place touche tous les autres professionnels. Autrement dit, rien ne prouve que vous parviendrez à relouer le local au même prix et dans de brefs délais, après le départ de votre locataire ;
-2ème argument : compte tenu du contexte exceptionnel (si l’on prend l’exemple de la crise du Covid-19), l’expulsion de votre locataire risque d’être longue. Les juges risquent d’utiliser toutes les marges de manœuvre à leur disposition (voir plus haut, partie sur l’échelonnement des loyers) pour expulser votre locataire le plus tard possible ;
– 3ème argument : un local exploité, même avec un loyer inférieur à celui du marché, a plus de valeur sur le marché ;
– 4ème argument : une baisse temporaire du loyer peut être financièrement beaucoup plus intéressante. Pas de conflit avec votre locataire qui va continuer à payer une partie du loyer, et qui, dès que les affaires reprendront, pourra régler le loyer à son niveau initial. Par ailleurs, les abandons de loyers font l’objet, en période de crise du Covid 19, d’avantages fiscaux.
Faites un avenant au contrat de bail !
Négociez avec votre locataire une baisse de loyer temporaire, sur 12 mois par exemple, ou un différé de loyer. Vous étalez le règlement d’une ou de plusieurs échéances sur 12 ou 18 mois…
Autre solution : inciter votre locataire à sous-louer (si c’est possible !) une partie du local afin de réduire le coût de son loyer, sans faire baisser le loyer global encaissé par vous.
Enfin, pensez aussi aux clauses « de retour à meilleure fortune. ». Cette clause prévoit que vous consentez à abandonner une partie du loyer à un moment donné, mais que vous aurez la possibilité, à l’avenir, de réclamer cette dette si la situation de votre locataire s’améliore.
Quelle que soit la forme choisie, cet arrangement doit être fait dans les règles de l’art et inscrit dans un avenant au contrat de bail commercial.