L’indemnité d’éviction d’un bail commercial est une compensation financière versée au locataire par le bailleur lorsque ce dernier résilie le bail commercial ou refuse le renouvellement du bail. Mais comment définir le montant de l’indemnité d’éviction ? Et dans quels cas le bailleur est-il exonéré ? Réponses dans notre dossier.
La résiliation du bail commercial par le bailleur ou le non renouvellement du bail par ce dernier peut contraindre le bailleur à verser une indemnité d’éviction au locataire pour le préjudice subi.
La lettre de congé du bailleur doit obligatoirement indiquer au locataire les motifs de la rupture du bail et le fait qu’il a la possibilité légale de la contester et de demander une indemnité d’éviction.
Indemnité d’éviction d’un bail commercial : les délais à respecter
Si l’indemnité d’éviction est quasiment réclamée systématiquement par les locataires poussés vers la sortie, elle ne constitue pas une obligation à être réglée par le bailleur au moment de la sortie des lieux.
C’est d’abord au locataire de réclamer l’indemnité d’éviction. S’il ne le fait pas, vous n’avez pas à en prendre l’initiative.
Par ailleurs, le locataire dispose de 2 ans, à partir de la date de son départ, pour demander l’indemnité d’éviction dont il aura estimé le montant.
Calcul de l’indemnité d’éviction d’un bail commercial : les éléments pris en compte
L’indemnité d’éviction doit être évaluée en fonction du préjudice subi. Elle peut être librement fixée « à l’amiable » entre vous et votre locataire.
Pas toujours facile toutefois d’évaluer avec précision le préjudice et ses retombées financières. Les mésententes sont légion en la matière.
Ce qui explique que, la plupart du temps, l’indemnité d’éviction est déterminée par un expert professionnel, dans le cadre d’une procédure judiciaire.
Cas n°1 : votre locataire peut poursuivre son activité dans le même quartier
Dans cette hypothèse, le locataire s’installe dans un local proche du premier pour exploiter son fonds de commerce, en signant un nouveau contrat de bail commercial avec un nouveau propriétaire.
La clientèle du locataire ayant la possibilité de le suivre, le bailleur n’est tenu de verser au locataire qu’une indemnité dite « de déplacement ».
Cas n°2 : votre locataire va devoir continuer son activité dans un autre secteur
Certes, le locataire peut poursuivre son métier, mais loin de son secteur initial et en perdant donc une bonne partie de sa clientèle.
Dans ce cas, l’indemnité d’éviction correspond souvent à la valeur du fonds de commerce, ou à la valeur du droit au bail, si cette dernière est supérieure.
Informations complémentaires pour les cas 1 et 2
Si, au moment de l’éviction de votre locataire, vous reconstruisez un immeuble commercial, votre locataire aura un droit de priorité pour louer dans l’immeuble reconstruit.
Votre locataire peut, en plus de l’indemnité d’éviction, vous réclamer des indemnités « accessoires » telles que :
- Les frais de déménagement et de réinstallation (y compris ceux liés au paiement d’indemnités de résiliation de contrats), ainsi que les frais et les droits de mutation liés à l’achat du nouveau fonds de commerce. Cette indemnité est dite « de remploi » ;
- Les frais liés au paiement d’un nouveau pas-de-porte éventuel ;
- Les frais de double loyer temporaire, le cas échéant ;
- Les frais de licenciement des salariés de votre locataire, si l’éviction rend inévitable une telle conséquence ;
- Une indemnité liée à la perte du logement qui faisait partie du bail commercial, le cas échéant ;
- Une indemnité pour pallier la perte d’activités accessoires. Par exemple, votre locataire tenait une brasserie dans laquelle il vendait aussi des cigarettes. Le nouveau local ne lui permet plus d’exercer cette 2ème activité ;
- Une indemnité de « trouble commercial » correspondant à la gêne occasionnée par le changement de local commercial.
Cas n°3 : votre locataire ne peut plus poursuivre son activité et perd le fonds de commerce
Il arrive que l’éviction entraîne pour votre locataire la disparition pure et simple de son fonds de commerce (ex : il ne trouve pas d’autre local pour reprendre son activité).
Dans ce cas, le préjudice est grand et l’indemnité d’éviction est calculée en conséquence, en fonction de la valeur du fonds, mais aussi de l’âge du locataire (ex : est-il proche de la retraite ?) et autres paramètres.
Attention : c’est à vous, bailleur, d’apporter la preuve que le fonds de commerce ne disparaît pas.
À noter :
- Le Code du commerce ne mentionne aucune méthode obligatoire pour déterminer la valeur d’un fonds de commerce. Les juges ont donc le libre choix d’utiliser celle qui leur convient. Mais, généralement, les chiffres d’affaires et les bénéfices des 3 dernières années font partie du calcul ;
- Le préjudice subi par le locataire évincé doit être évalué au jour de son départ effectif, ou à la date de la décision de justice, si le locataire occupe encore les lieux ;
- Une fois que vous lui avez versé l’indemnité d’éviction négociée, votre locataire a 3 mois pour quitter le local. Tant que vous ne lui avez pas versé l’indemnité d’éviction, votre locataire peut légalement refuser de quitter les lieux, sauf exception (ex : clause contraire inscrite au bail).
Les 4 cas où l’indemnité d’éviction du bail commercial n’est pas due
Dans certaines situations, l’indemnité d’éviction n’est pas due si :
- La Préfecture reconnaît l’état d’insalubrité du bâtiment abritant le local commercial, impliquant sa démolition totale ou partielle ou établissant qu’il ne peut plus être occupé sans danger ;
- Au jour du congé, votre locataire n’est plus officiellement propriétaire du fonds de commerce. C’est le cas, par exemple, s’il n’est plus immatriculé au registre du commerce et des sociétés (RCS) ou au répertoire des métiers ;
- Votre locataire n’exploite plus son fonds de commerce depuis 3 ans ;
- Vous avez des reproches graves à faire à votre locataire, comme le non-paiement du loyer et/ou des charges locatives, ou tout autre motif grave.