La fin de la taxe d’habitation n’a pas fait que des heureux. Elle a privé les services fiscaux d’informations nécessaires à l’attribution du Chèque énergie. Certains français pourraient en être privés.
L’annonce de la fin de la taxe d’habitation pour les résidences principales, applicable dès janvier 2023, avait été accueillie comme une bonne nouvelle par de nombreux foyers, qui voyaient du même coup augmenter leur pouvoir d’achat.
Le cauchemar des services fiscaux
La taxe d’habitation avait été mise en application en 1974 par le gouvernement Messmer, premier ministre de Georges Pompidou. Appliquée à l’ensemble des occupants d’un logement (et aux propriétaires des logements vides), la taxe d’habitation donnait aux collectivités locales un budget pour financer les services locaux comme l’école publique, les services sociaux, les équipements, etc.
À lire Comprendre le profil de l’emprunteur immobilier : des explications sur mesure
Cinquante ans après, la taxe d’habitation a été supprimée, conformément à la promesse du président Macron. L’exonération ne concerne toutefois que les résidences principales. Les résidences secondaires restent soumises à la taxe d’habitation, tout comme les logements vacants. La taxe d’habitation sur les résidences principales rapportaient plus de vingt milliards d’euros aux collectivités locales.
La nouvelle s’est pourtant transformée en cauchemar. En novembre 2023, de nombreux français ont eu la mauvaise surprise d’apprendre qu’ils étaient redevables de la taxe d’habitation sur leur résidence secondaire… alors que le logement concerné était leur résidence principale. Les services fiscaux ont découvert qu’il n’était pas toujours évident de faire la différence entre résidence principale et résidence secondaire.
Menaces sur le Chèque énergie
Le traitement de la taxe d’habitation donnait aux services fiscaux de précieux renseignements, notamment le nombre d’occupants dans un foyer. Privé de cette information, le fisc a toutes les peines du monde à déterminer quels foyers seront éligibles au Chèque énergie.
Le Chèque énergie a été mis en place par le gouvernement pour soutenir financièrement les revenus modestes dans le règlement de leurs factures d’énergie. Les services fiscaux déterminent les foyers éligibles en fonction du revenu fiscal et du nombre de personnes qui composent le foyer.
À lire Faut-il encore payer la taxe d’habitation ?
Les associations de consommateurs ont alerté, en février 2024, sur le risque de voir plusieurs foyers privés du précieux chèque. Ils estiment qu’un million de familles pourraient être oubliées malgré une éligibilité manifeste. L’alerte a été entendue par le gouvernement et le ministre de l’Économie Bruno Le Maire est intervenu sur les plateaux de télévision pour maintenir que tous les ménages éligibles recevront bien leur chèque.
Le ministre a proposé la création d’un “guichet de réclamation”, une variante des numéros verts qui permettrait aux contribuables n’ayant pas reçu le Chèque énergie dans les délais de se manifester. Le service sera mis en ligne avant la fin de l’année. Le ministre reconnaît les difficultés des services fiscaux en manque de données précises depuis la suppression de la taxe d’habitation.
Quand les déclarations saturent les services
Pour recueillir des informations, la DGFIP, direction générale des finances publiques, avait fait parvenir, au début de l’année 2023, une déclaration de biens immobiliers à remplir par les propriétaires de logements. Ceux-ci avaient jusqu’au 30 juin 2023 pour transmettre ces informations, mais cette date butoir a été plusieurs fois repoussée.
Les agents du fisc ont en effet été débordés par le flux inhabituel de déclarations et même les serveurs informatiques ont connu une certaine saturation. Les syndicats sont d’ailleurs revenus à ce sujet sur les effectifs des services fiscaux, qui ont connu une forte diminution depuis 2017 (environ 12.000 fonctionnaires en moins sur l’ensemble du territoire).
À lire Préparez-vous : Une augmentation des loyers de 2,47 % prévue pour fin 2024 !
Les syndicats font également savoir que si les services fiscaux s’adaptent généralement très vite aux décisions politiques, ils demandent toutefois à ce que les décideurs fassent preuve d’anticipation et mesurent bien les conséquences de leurs réformes.
Pour en revenir à la déclaration des biens immobiliers, plusieurs voix suggèrent qu’elles soient intégrées à la déclaration annuelle des revenus. Cela permettra aux services fiscaux de faire les rapprochements nécessaires pour déterminer les foyers éligibles aux opérations de type Chèque énergie.