Une étude des notaires note que les logements les plus énergivores sont plébiscités par les acheteurs immobiliers… en quête de biens décotés. Est-ce une bonne idée de s’y intéresser ? Comment les bailleurs vendeurs de tels logements peuvent-ils calculer la décote ?
L’intérêt grandissant des acheteurs pour les logements énergivores
Les notaires de France l’ont constaté : de plus en plus d’acheteurs regardent désormais avec intérêt les logements les plus mal notés sur le plan énergétique. Pourquoi, alors qu’ils les éliminaient d’office il y a quelques mois ? La réponse est liée à la conjoncture économique et financière. L’inflation a fait bondir les taux d’intérêt des crédits immobiliers (avec pour conséquence une moindre surface achetable) et les banques sont plus frileuses sur l’octroi des crédits. Ayant plus de difficultés à financer l’achat immobilier envisagé à l’origine, les candidats propriétaires se tournent donc vers des biens décotés qui leur permettent de conserver la surface envisagée.
Au cours du 2ème trimestre 2023, près d’une vente sur cinq (18 %) a concerné une passoire thermique, logement noté F ou G dans le diagnostic de performance énergétique (DPE). Les notaires de France notent ainsi que la part des logements classés F et G dans les ventes globales a bondi de 7 points en seulement 2 ans. Puisqu’elle était égale à 11 % lors du 2ème trimestre 2021.
Acheter une passoire thermique, c’est bénéficier d’une décote d’environ 15 %
D’après les experts, avec la hausse des taux d’intérêt des crédits, les acheteurs immobiliers ont perdu 25 % de pouvoir d’achat en 2 ans. La décote moyenne de 15 % (mais elle peut grimper à 20 %) sur les passoires thermiques est donc une véritable aubaine pour les acheteurs. D’après un sondage OpinionWay pour BigMat, 46 % des Français reconnaissent voir dans l’achat d’une passoire thermique une « opportunité d’un investissement rentable », notamment les jeunes actifs âgés de 25 à 34 ans (58 %), plus concernés que les autres par les difficultés de financement de leur achat immobilier.
Les investisseurs doivent-ils s’intéresser aux passoires thermiques ?
En réalité, les bailleurs qui ne souhaitent pas se lancer dans des travaux sont justement ceux qui vendent à prix parfois cassés leurs logements énergivores locatifs pour échapper à la menace d’interdiction de location, à terme (voir dernier paragraphe de l’article). Mais certains investisseurs réfléchissent tout de même à profiter de l’opportunité d’un achat à prix décoté. D’après une étude de prix publiée en 2019 par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME), gagner une classe énergétique au DPE sur une maison individuelle nécessiterait un investissement moyen de 16.000 €.
En tout état de cause, il est indispensable d’estimer le coût des travaux énergétiques avant de faire une offre d’achat. Mais pas seulement ! Il faut aussi vérifier que ces derniers seront bien réalisables (techniquement, par rapport au règlement de la copropriété…). Enfin, il est judicieux de faire une étude concernant les aides possibles accordées aux bailleurs. MaPrime Rénov’, les CEE, les aides locales… N’hésitez pas à vous renseigner auprès des ADIL pour toutes les connaître.
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Quelle décote appliquer au logement énergivore à vendre ?
Pour que les acheteurs y trouvent leur intérêt et soient intéressés par votre bien, il faut déterminer une décote un peu supérieure au montant des travaux à réaliser… Vous devez donc, vous aussi, faire réaliser de votre côté un devis par un ou des professionnels. Le chiffre de 15 % est une moyenne. Cela peut évidemment être moins pour des biens très recherchés et être un peu plus pour des biens moins cotés. Les logements parisiens, par exemple, ne subissent qu’une décote de 5 %, d’après les professionnels, tandis que dans des villes au marché locatif moins tendu, la décote peut atteindre 30 %, et même plus.
Les passoires énergétiques sous la menace d’une interdiction de location
Rappelons que les passoires énergétiques (logements notés E, F ou G dans le diagnostic de performance énergétique) sont montrées du doigt depuis ces dernières années et leurs propriétaires sont fermement incités à les rénover. Pour les bailleurs, l’incitation est même menaçante : à terme, les logements notés E, F et G seront tous classés « indécents » et donc interdits à la location. Le calendrier est celui-ci :
- Depuis le 24 août 2022, la loi Climat et Résilienceinterdit les augmentations de loyer des logements notés F et G dans le diagnostic de performance énergétique (DPE), lors d’une remise en location ou d’un renouvellement de bail. Les locations en cours ne sont pas concernées ;
- Depuis le 1er janvier 2023, les logements dépassant le seuil de consommation de 450 kilowattheures d’énergie finale par m² de surface habitable et par an (« G+ ») sont interdits à la location (là encore, les locations en cours ne sont pas concernées). N’hésitez pas à lire notre fiche Passoires thermiques interdites à la location en 2023 : que devez-vous faire si vous en louez une ?;
- A partir de 2025, seront également concernés par l’interdiction de location tous les autres logements classés G ;
- A partir de 2028, ce sera au tour des logements classés F ;
- Enfin, à partir de 2034, les logements classés E ne pourront plus être mis en location.