Vous avez peut-être été confronté au problème. Votre locataire vous informe que son logement est envahi de punaises de lit et vous demande de l’en débarrasser. Est-ce effectivement à vous de le faire ?
Source de contentieux entre bailleurs et locataires, ce fléau est de plus en plus préoccupant. Pour preuve, les Pouvoirs Publics s’en emparent. Le 6 octobre 2020, Cathy Racon-Bouzon (députée LRM des Bouches-du-Rhône) a remis un rapport avec recommandations au ministère du logement.
En attendant, que dit la loi, aujourd’hui ? Que c’est à vous, bailleur, de prendre en charge la désinfection du logement locatif… sauf si vous prouvez que c’est votre locataire qui a introduit les insectes.
La députée auteure du rapport le rappelle dans un article du journal Le Monde consacré à la jurisprudence : « il résulte de la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs, et de la loi ELAN du 23 novembre 2018, que le maintien d’un logement en état de décence », c’est-à-dire « exempt de toute infestation d’espèces nuisibles et parasites », incombe au bailleur, « non simplement au moment de la signature du contrat », mais aussi « tout au long du bail ».
Prouver que le locataire a apporté les punaises est complexe…
Prouver que c’est votre locataire qui a introduit les punaises de lit est évidemment très compliqué. Comment prouver, par exemple, que ce dernier a rapporté dans le logement un meuble ancien qui contenait ces nuisibles ? Difficile, pour ne pas dire impossible.
Pour les nouveaux baux (nus ou meublés), la solution résiderait-elle dans un état des lieux particulier avec indication d’une absence de punaises de lit constaté par huissier avant la délivrance du logement ? Sans doute coûteux car il faudrait faire intervenir un expert de ces insectes, prêt, en plus, à attester de leur absence… Pas si facile, apparemment, d’être sûr de ce fait comme en atteste un dernier jugement de la Cour d’appel de Paris, le 2 octobre 2020. La Cour a condamné le bailleur d’un logement à rembourser à son locataire le loyer, le dépôt de garantie, ainsi que les frais d’hôtel et de pressing, malgré le fait que le bailleur attestait d’une opération de désinsectisation avant le démarrage du bail. Le locataire ayant indiqué, dès le lendemain de son installation, avoir souffert de piqures, le juge a estimé que l’opération d’assainissement du logement n’avait apparemment pas fonctionné et que le bailleur avait donc « manqué à son obligation de délivrer un logement décent ».
Attention ! Vos obligations de bailleur consistent à traiter le problème de la présence des punaises en payant la désinsectisation, pas à en faire plus. Ainsi, les demandes de relogement des locataires ne sont pas – sauf exception – à votre charge.
… mais les juges n’accèdent pas à toutes les demandes des locataires !
Ainsi, comme le raconte la journaliste du Monde, Rafaële Rivais : « la cour d’appel d’Orléans a refusé, en juin 2019, de déduire des dépenses de relogement, comme le lui demandaient des locataires se disant contraints d’avoir déménagé à cause de punaises de lit. » Pour la Cour, le fait que le bail ait été conclu en 2011 et que la présence de punaises n’ait été constatée que plusieurs années plus tard, en 2015 (année au cours de laquelle le bailleur a bien demandé à une société spécialisée d’intervenir) montre que le propriétaire a fait ce qu’il fallait faire et n’a pas manqué à ses obligations.
Par ailleurs, et fort heureusement, certains juges prennent également en compte l’obligation d’entretien du logement par le locataire. S’il est prouvé que celui-ci n’a pas bien entretenu son logement qui s’est, par conséquent, retrouvé infesté de nuisibles (il aurait aussi fallu demander au bailleur d’intervenir plus tôt !), le bailleur peut même résilier le bail ! La cour d’appel de Montpellier a ainsi, en décembre 2018, accordé la résiliation du bail d’un locataire en arguant que : « l’état déplorable de l’appartement a favorisé le maintien dans les lieux des punaises, et a même conduit à leur prolifération. »
N’hésitez pas à lire l’article complet du Monde pour avoir accès à toutes les autres jurisprudences citées.